Indéros N°18
Six albums pour tes prochaines nuits…
Quand je pars de là à chaque fois j’ai le cœur brisé. La nuque, les cheveux et le t-shirt encore trempés. Les grues clignotent et le vent levé, il fait plus chaud la nuit que le jour. Bientôt il n’y aura plus ces vieilles camionnettes toutes décrépites, le monde sera si propre, les gens seront tous refaits. Avant ça j’aimerais bien être skateur. Pour rouler en chialant. Et puis me faire renverser par une voiture, et dans cette voiture, au volant il y aura cette fille trop belle. Et paniquée elle m’invitera chez elle pour désinfecter mon genou égratigné. Elle m’avouera un mois après qu’un skateur qui pleure c’est trop cute. On fera des messes louches parce qu’elle adorera les fruits vu que c’est une fille trop belle mais qu’elle se drogue plus que moi et que ça m’influence au niveau comportemental. J’aime ces longs dimanches qu’on a pour écouter de la musique, Cienfuegos notamment qui est vraiment un mec barré. Et pendant ce temps je lui caresserai les cheveux pour un sourire et une pipe quand elle ira mieux. Elle revendra sa voiture et je l’inviterai en vacances là où elle aura rêvé la veille du départ. On a le droit d’être reconnaissant des bienfaits que nous offre la vie, même si la vie c’est surtout des êtres humains qui sont pas pareils qui se retrouvent et échangent et qui parfois s’aiment trop. (CL)
Sean Nicholas Savage – Screamo
Dieu, que Sean me rend romantique. Dans ma tête, mon souvenir est un peu déformé. J’imagine le voir au lever du soleil dans un endroit perdu, il me semble que Ruoms n’existe pas vraiment.
Le petit matin, les pieds mouillés, dansant avec nos yeux à peine réveillés. Toi et moi, côte à côte mon ami love et pur. Cette voix canadienne sensuelle est toujours aussi jolie. Je me demande même comment c’est possible de faire autant de bon titres à la suite. Ça s’arrête pas un jour le talent ? Ce qui ne s’arrêtera jamais c’est mon amitié que je vais célébrer avec toi. Ma mémoire me dit que je suis allée te chercher un jus d’orange pressé tout frais, et cette fois-ci, pas de fumée. Tu peux le siroter tranquillement, Sean m’inspire que de la douceur. Bon oui, et aussi de la sensualité. Dieu, qu’il peut-être charmant. Sa dégaine est mystique et ses chemises pas du tout ajustées à son corps longiligne. On dirait presque un extra-terrestre de la galaxie lointaine : cette pensée me fait bailler. Je serre par mes petits poings les plis de mon pyjama froissé. Comme Lolita, je lui fais les yeux doux, même si ça me fait très peur s’il s’approche de moi. Heureusement, toi tu es là. Tu as toujours été là pour me protéger, pas que te dandiner, ou pire, me pousser loin quand tu voyais une fille qui te plaisait. Tu me fais rire, j’ai encore cette impression, que tu avais vraiment de longs poils sous les aisselles. C’était vrai ou une illusion ? Hé! C’’est tout ça Sean. De la mélancolie, des rires oubliés et être contents de sortir de son lit pour aller vivre cette journée, en pleine campagne et camping équipé. Même sous le soleil et le vent frais. J’avais bien dormi la nuit. Toi aussi. Tu t’en rappelles ? On avait presque rêvé des mêmes choses. On avait presque soulevé les paupières en même temps. Ces moments sont gravés dans mes organes comme dans de la pierre solide. Aujourd’hui, j’aimerais qu’on retourne dans un coin paisible, découvrir ses nouveaux morceaux de Screamo. Plutôt qu’être aussi loin l’un de l’autre, à gravir trop de rochers pour se retrouver… (SA)
Elle a percé ce sac de sable que j’avais oublié sur mes épaules. Commence alors un écoulement derrière les pas de ce voyage ectoplasmique. Un vague à l’âme céleste sous une lune de douceur. Ce paysage que je traverse m’est inconnu. A l’abandon toutes les questions, mais pas les doutes et les mystères. La brise est retenue dans une grâce solennelle. Sous une canopée d’argent sifflent des arbres sans âge, quand glisse enfin le manteau de mes souvenirs. De mes pieds nus, la mousse est amoureuse. A l’horizon, la terre fumante tapisse le ciel d’une guérison. J’avance. Des herbes folles caressent mes jambes lentement. Je fais le tour de ce buisson. Derrière se cache un lac sans fond. Limpide et silencieux, c’est le miroir des cieux. C’est bien ici que s’arrête le temps. C’est bien ici la quintessence du chant. Flottant les bras ouverts, les yeux au ciel comme suspendus par l’univers. Merci Hilary Woods. (JB)
Ouais je t’ai trop longtemps imaginé, l’amour. Avec tes grands airs, t’es détaché et t’es attachant. Tes airs de pas y toucher, mystérieux et distants, m’ont longtemps effrayé mais cette nuit je perce ton secret. L’amour, diront certains, est une sacrée chose. Moi je dirais que c’est une bêtise. Une blague, une mauvaise, une bonne, qui nous fait rire et totalement déprimer, qu’on a le droit d’exprimer car la liberté d’expression quoi ! L’égocentrique autant que l’altruiste, le misanthrope comme le bon samaritain, tous en sont propriétaires. Même si, à bien y regarder il faudrait parfois interdire d’aimer. L’amour est un sujet qu’il convient de traiter avec une prompte dévotion dans le sacrifice et une intelligence sensible dans l’émotion. L’amour c’est pas une putain d’esclave que tu vas garder au chaud dans ta chambre pourrie d’étudiant éternel qui sent la chaussette, c’est pas non plus une flèche empoisonnée comme celle que l’homme serpent lance sur la meuf de Connan dans Connan Le Barbare. Si l’amour fuit regarde le filer crache par terre et pars en balade. Dis toi que le succès en amour et en musique c’est la même chose. Ça mène ceux qui en ont à tout un tas de bévues, de malentendus, de gueules de bois, et tu finis en pleine détresse par tout laisser tomber. Pour tout le reste, il y’a ce très bel album que je conseille à tout le monde, même à ceux qui me haïssent et crachent dans mon dos dès que je me tourne pour boire un punch avec Marion. (CL)
Nique le club. Si hier je t’ai demandé de m’accompagner c’est juste pour voir ce qu’il pourrait se passer. On entend les gros caissons de basse au loin, il est déjà si tard et Essaie Pas ont des titres si dark. Je te laisse aller chercher les verres ? Ils passent ce morceau que j’ai en tête depuis que je suis arrivée sur ces terres. On sait très bien qu’il ne se passera rien. Le nouvel album me fait couler dans une rivière profonde de jet 27 mais tiède. Ta danse me fait tourner la tête et ton regard espiègle me fait rougir. Où sont nos amis ? Tu ne veux pas qu’on aille fumer dehors vite fait ?
J’ai déjà fini mon paquet, j’en ai pas besoin mais me retrouver 5 minutes seule avec toi m’angoisse comme Les Aphides. Une tension entre nous, c’est déjà quelque chose. Il n’y a pas de lumière, je sens juste ta main ferme remonter mon kimono sur mon épaule un peu humide. “C’est par la pensée même qu’on passe au prochain palier”. Toi aussi tu me parles au futur. Tu aimerais pouvoir m’attraper.
Mais mon épaule, elle est toute humide par la sueur que je m’inflige à m’agiter comme un devil sur des morceaux sombres et presque linéaires. Un peu new wave, un peu fou, I need to know, too. J’ai envie que tu t’approches de mon corps qui tangue un peu, qu’avec cette main de maçon tu fasses une légère pression autour de mon cou. Tu t’avances, je te repousse. Le concert n’est pas encore fini et New Path me rend dingue. Forcément. Et ça m’excite trop si tu serres mon cou. Je ne peux pas te laisser me faire ça, en tout cas, pas devant tout le monde.
Et pourtant, je ne vois plus personne. La soirée est à nous, il est 5:00 passé, et j’ai l’impression qu’on restera là pour toujours. Autour de gobelets vides, du sol collant et de nos rapprochements.
Hier, je n’avais pas envie de me censurer. C’est presque dire que tu me plais. Et si ce soir… ah, ce soir. C’est de nouveau toi, qui me fuis. (SA)
Je me traîne depuis sex minutes derrière cette brune aux cheveux longs et raides. Je rêve qu’elle se retourne avec son sac à dos, s’approche, que ma ceinture vole au vent, et qu’elle me branle en plongeant dans mes yeux, mais je suis heureux qu’elle tourne dans une ruelle et que nos chemins se séparent enfin; je n’aime pas sentir qu’une fille que je suis fortuitement se sente elle-même suivie par le pervers que je ne suis en définitive pas. Je ne fais pas toujours ce que je veux, les autres autour non plus. Nous partageons néanmoins des instants de bonheur auxquels on s’attache sans répit. Jusqu’à ce que le jour du repos vienne. Je rentre de cette boum, on appelait les fêtes d’anniversaire comme ça quand j’étais petit et que maman parlait aux mamans de mes copains et de mes copines, ce qui n’arrive plus, ce qui est bien dommage. Ma petite maman, parfois je pense à ne plus causer à aucune fille sur Terre, mais bien sûr je pense à toi et je me dis que ce n’est pas possible. Maintenant les boums sont remplis de gosses vraiment soûls et ça me saoule moi aussi. Je voudrais redevenir innocent. J’écoute encore une fois Oliver Coates, l’adulte exemplaire, acidulé et brillant. (CL)
Chroniques d’albums par Charly Lazer, Amandine Steiger et Jean Bamin

- édito
- Les Matins Éternels
- Nyctalope
- Nuit Blanche
- Mixtape d’Amour par Akzidance (Tropicold / Sidi&co)
- Lost in Nikko
- Brève Nocturne
- Nuitée Féebrile
- Sécrétion Story
- Toi Mon Insomnie
- Bite
- Noche
- Extrait de mon premier roman qui sortira peut-être jamais
- Zeus Red
- La Nuit Appartient à Dubais
- Miss Louise
- Godes et Maux de Passe
- Rencontre Nocturne
- Gaule, Éluard et Les Bruits Du Monde
- Elle Court Avec Les Loups Quand Le Soleil Se Couche
- Objectif Lune
- The Night Is Young
- Indéros N°18
- Peau Froide, Nuit Chaude